Le changement climatique qui atteint notre pays a surpris les français durant l’été 2022, lorsque l’eau n’a plus coulé au robinet dans de nombreuses communes et que des camions citernes sont venus leur porter secours. Le stress hydrique a été le déclencheur d’une prise de conscience collective de ce que la France n’est plus en Europe cet îlot péninsulaire de fraîcheur et d’abondance en eau qu’elle fut de temps immémoriaux. Car nous sommes entrés dans un monde marqué par les effets du réchauffement de la planète auxquels notre pays n’échappe pas.
La France connaîtra inéluctablement et de façon récurrente des épisodes de sécheresse plus longs et de sévérité croissante, les nappes phréatiques connaissant des recharges hivernales insuffisantes dans nombre de nos régions, dont les populations et les différentes catégories d’usagers de l’eau subiront des restrictions de consommation.
Les tensions montent dangereusement entre celles-ci. Les conflits s’avivent, prenant des formes violentes, comme à Sainte-Soline (Deux-Sèvres) le 25 mars 2023.
Ces confrontations, en nombre accru, sont une menace pour la cohésion nationale et pour la paix sociale dans les territoires. La prévention de ces conflits, par un dialogue organisé et régulé, mais aussi par la possibilité offerte d’une saisine d’une autorité indépendante dotée des moyens de mener des procédures visant à la résolution amiable de litiges opposant entre elles plusieurs catégories d’usagers, doit être instituée.
La saisine du Conciliateur national des conflits d’usage de l’eau sera ouverte aux autorités publiques locales de l’État (préfets) et des collectivités territoriales disposant de la compétence eau potable, assainissement et GEMAPI (maires, présidents de communautés de communes ou d’agglomération, présidents de métropoles, présidents de syndicats intercommunaux et SPL, Présidents des Commissions Locales de l’Eau, etc.) ainsi qu’aux associations de consommateurs et d’usagers de – 3 – l’eau, associations environnementales, aux entreprises des secteurs agricole et industriel ainsi qu’à leurs fédérations professionnelles et aux présidents d’établissements consulaires (chambres de commerce et d’industrie, chambres des métiers et de l’artisanat, chambres d’agriculture).
Son champ de compétences portera sur tout litige relatif à l’accès à la ressource en eau, aux restrictions d’usage de l’eau, au partage de la ressource à l’échelle d’un territoire lorsque celle-ci se trouve contingentée du fait de son insuffisance constatée pour satisfaire l’ensemble des besoins exprimés.
Le Conciliateur national des conflits d’usage de l’eau, après audition des parties en présence au litige, ainsi qu’à sa diligence après réalisation d’expertises, et après réunions de concertation menées sous sa présidence, remet ses recommandations, sous forme d’un rapport public. En application de la mesure 33 du Plan d’action pour une gestion résiliente et concertée de l’eau, il s’assurera notamment de l’avis de l’instance de dialogue (CLE) dont chaque sous bassin versant sera doté, émis sur la base du projet politique de territoire organisant le partage de la ressource à établir d’ici 2027.
Cette autorité indépendante, inspirée dans sa conception du médiateur national de l’énergie, créée par la loi n°2006-1537 du 7 décembre 2006 relative au secteur de l’énergie, bénéficiera d’un statut encadré par la loi n°2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes. Ainsi le Conciliateur national des conflits d’usage de l’eau, doté de la personnalité morale et de l’autonomie financière, dont le budget sera voté chaque année par le Parlement en loi de finances, verra son champ de compétence et les modalités de son intervention définis et encadrés par des dispositions nouvelles de la partie législative du code de l’environnement.
La création de cette autorité indépendante n’a pas pour objet de se substituer à la Médiation de l’eau, créée sous forme associative en 2009 à l’initiative des acteurs institutionnels représentatifs du secteur de l’eau et de l’assainissement : élus et collectivités territoriales (AMF, AdCF, FNCCR, Villes de France, Amorce), opérateurs en régie (FNCCR France Eau Publique), en SEM, SPL (FedEPL) ou en délégation de service public (FP2E, FDEI). Ce dispositif associatif pertinent et efficace de médiation de consommation sectorielle (eau) permet à tout abonné, consommateur ou non, de soumettre des litiges individuels relatifs à l’eau et à l’assainissement des eaux usées.
La médiation de l’eau assure une mission de médiation des litiges de consommation dans les conditions prévues aux – 4 – articles du code de la consommation pour les litiges des consommateurs personnes physiques, par les articles L. 612-1 et suivants et R. 612-1 et suivants du code de la consommation, que le Conciliateur National des conflits d’usage de l’Eau n’aura pas vocation à traiter. Le Conciliateur national des conflits d’usage de l’eau, comme le médiateur national de l’énergie dans son domaine, aura également vocation d’informer nos compatriotes et de relayer les annonces gouvernementales en matière de mesures de protection de la ressource et d’appels à la sobriété des usages.