Notion de patrimoine commun de la Nation à l'eau et à la forêt

Appliquée aux richesses et ressources naturelles de la France, la notion juridique de patrimoine commun de la Nation a été introduite par le législateur dans la loi en 1992 pour l’eau (Loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 sur l’eau dite loi Barnier, Article 1) :

« L’eau fait partie du patrimoine commun de la nation. Sa protection, sa mise en valeur et le développement de la ressource utilisable, dans le respect des équilibres naturels, sont d’intérêt général.

L’usage de l’eau appartient à tous dans le cadre des lois et règlements ainsi que des droits antérieurement établis ».

Cet article a été abrogé par l’Ordonnance n° 2000-914 du 18 septembre 2000 relative à la partie Législative du code de l’environnement : Article 5-I-30° : « Les articles 1er à 12, le II de l’article 13, les articles 15, 16, 18 à 27, 28-1 à 31, le second alinéa de l’article 37, les articles 42 à 44, le premier alinéa de l’article 45 et l’article 48 de la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 sur l’eau ; ».
La loi n° 2006-1772 du 30 décembre 2006 sur l’eau et les milieux aquatiques (article 1, alinéa 1) l’a réinstitué : «L’eau fait partie du patrimoine commun de la nation. Sa protection, sa mise en valeur et le développement de la ressource utilisable, dans le respect des équilibres naturels, sont d’intérêt général. »

Puis l’article L110-1 du code de l’environnement modifié par la loi n°2021-1104 du 22 août 2021 – art. 48 en a restreint curieusement la portée, remplaçant « eau » par « qualité de l’eau » de manière restrictive : « A la première phrase du premier alinéa du I de l’article L. 110-1 du code de l’environnement, après le mot : « air, », sont insérés les mots : « la qualité de l’eau, ») :

Néanmoins et dans le même temps, cet article de portée législative du code de l’environnement élargit substantiellement l’applicabilité de la notion de patrimoine commun de la Nation dans les termes suivants :

« – Les espaces, ressources et milieux naturels terrestres et marins, les sons et odeurs qui les caractérisent, les sites, les paysages diurnes et nocturnes, la qualité de l’air, la qualité de l’eau, les êtres vivants et la biodiversité font partie du patrimoine commun de la nation. Ce patrimoine génère des services écosystémiques et des valeurs d’usage.

Les processus biologiques, les sols et la géodiversité concourent à la constitution de ce patrimoine. »

Toutefois, la définition de la notion de patrimoine commun de la Nation reste, aux termes de cet article L110-1 du code de l’environnement modifié par la loi n°2021-1104 du 22 août 2021 encore imprécis en ce qu’il y intègre les « ressources et milieux naturels terrestres et marins » sans en donner une définition juridique précise. Ainsi, paraît-il par exemple pertinent de substituer à la définition « qualité de l’eau », restrictive, celle de « ressource en eau » et de substituer à celle de « ressources et milieux naturels terrestres et marins » celle de « ressources et milieux naturels constitués des sols agricoles, des forêts, des mers, océans et zones aquacoles ». Les forêts sont notamment une dimension majeure du patrimoine commun de la Nation méritant d’être mentionnée explicitement. Comme l’eau, leur exploitation, créatrice de richesse et d’emploi durables par une filière et un écosystème dont la pérennité ne sera garantie qu’en veillant à la protection de la ressource forestière menacée par le changement climatique est une dimension majeure de l’activité économique nationale. Elles dépassent même désormais celle-ci, puisque plusieurs massifs français, celui de la Réserve Naturelle Nationale du Massif du Grand Ventron, située à cheval sur les départements des Vosges et du Haut-Rhin et deux autres hêtraies françaises, la réserve biologique du Chapitre dans les Hautes-Alpes et la réserve Naturelle Nationale de la Massane dans les Pyrénées-Orientales ont été classés au patrimoine mondial de l’humanité par l’UNESCO (catégorie « Forêts primaires et anciennes de hêtres des Carpates et d’autres régions d’Europe » qui regroupe 96 forêts réparties dans 18 pays).

Cela paraît d’autant plus souhaitable que le même article L.110-1 du code de l’environnement donne une définition précise de la notion de biodiversité, à l’inverse de celle de Patrimoine commun de la Nation : « On entend par biodiversité, ou diversité biologique, la variabilité des organismes vivants de toute origine, y compris les écosystèmes terrestres, marins et autres écosystèmes aquatiques, ainsi que les complexes écologiques dont ils font partie. Elle comprend la diversité au sein des espèces et entre espèces, la diversité des écosystèmes ainsi que les interactions entre les organismes vivants. ».

Enfin, il paraît corrélativement nécessaire de compléter l’article L.415-3 du code de l’environnement pour compléter en y intégrant les atteintes aux forêts d’Exception, ayant reçu le label de l’Office national des forêts dans le respect de valeurs et principes d’une charte nationale et sous le contrôle du Comité national d’orientation, composé de représentants des ministères de tutelle de l’ONF (Ministère de l’Agriculture, de l’Agroalimentaire et de la Forêt et Ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie), de représentants de l’ONF et d’experts interdisciplinaires.