EXPOSÉ DES MOTIFS

La présente proposition de loi vise à intégrer la souveraineté hydrique, consubstantielle à la souveraineté alimentaire voire conditionnant celle-ci, à la liste des intérêts fondamentaux de la Nation, au même titre que « son indépendance, l’intégrité de son territoire, sa sécurité, la forme républicaine de ses institutions, les moyens de sa défense et de sa diplomatie, la sauvegarde de sa population en France et à l’étranger, l’équilibre de son milieu naturel et de son environnement et les éléments essentiels de son potentiel scientifique et économique et de son patrimoine culturel » (article L. 410-1 du code pénal).

Elle vise également à compléter les dispositions du code de l’environnement (article L210-1) et du code rural et de la pêche maritime (Livre préliminaire, article L. 1- I- 1°A).

Avec l’épisode de sécheresse qu’a connu la France en 2022, conséquence des effets du changement climatique, et qui a mis au jour la vulnérabilité de l’approvisionnement en eau de nombreuses communes, il est apparu avec une évidence renouvelée, tant à l’opinion publique qu’aux pouvoirs publics nationaux et locaux, que la capacité d’un État et de ses collectivités territoriales à garantir l’accès à l’eau figurait bien au nombre des intérêts fondamentaux de la Nation, notamment parce qu’elle conditionne la production agricole, qui ne peut durablement être assurée sans accès à une ressource en eau suffisante. La souveraineté hydrique doit être entendue, selon la définition qu’en a proposé en 2022 un expert international français du droit de l’environnement comme un « droit des États à décider de leurs propres stratégies pour garantir leur sécurité d’accès à l’eau, ressource naturelle et bien social et économique, tout en considérant les effets sur les pays et populations limitrophes. Elle garantit, par le biais de choix d’usage mais aussi de politiques publiques d’exploitation raisonnée, l’accès à une ressource saine et durable, endogène et/ou exogène, strictement nécessaire à la satisfaction des besoins de leurs populations et de leurs économies, tant agricoles qu’industrielles ».

La notion de « souveraineté alimentaire » est aujourd’hui inscrite dans l’intitulé même du ministère de l’agriculture (ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire). Mais elle n’est présentement définie que par l’article L.1-14° du code rural et de la pêche maritime. Un amendement du sénateur Franck Menonville visant à la faire reconnaître parmi les intérêts fondamentaux de la Nation par un article additionnel à l’article 1 de la proposition de loi d’initiative sénatoriale pour un choc de compétitivité en faveur de la ferme France, a été adopté par le Sénat lors du vote en première lecture, le 23 mai 2023, de celle-ci.

Cette reconnaissance législative doit impérativement être corollairement accompagnée d’une reconnaissance simultanée du principe de souveraineté hydrique. Il est donc proposé de modifier à cet effet plusieurs dispositions du code pénal, du code de l’environnement et du code rural et de la pêche maritime. Ainsi, serait donnée une portée normative équivalente à ces deux principes indissociables de nature à garantir de manière pérenne la capacité de production agricole de la France, intrinsèquement liée à la satisfaction de ses besoins en eau, tant pour l’agriculture que pour la consommation humaine et industrielle.